C'était une journée comme les autres. Je ne vois vraiment pas en quoi cette journée pourrait être différente. Rien de spéciale perturbait le quotidien qui c'était imprimé dans ma vie habituelle. Je ne m'étais pas levé ni du bon, ni du mauvais pied. En fait, je ne sais même pas si j'ai bien fais de me lever ce matin. C’est temps-ci, j'étais prise dans un piège, dans un phénomène de gravité qui me clouait à l'incertitude et à la culpabilité, chose anormale dans ma vie; signe que j'allais mal. Mal ? Mais pourquoi ? Ça, je ne savais point. J'avais envie de retrouver le soleil qui manquait à ma vie, la joie qui manquait dans mon cœur, mais comment retrouver un sentiment perdu quand on ne sait pas, déjà au départ, pourquoi on se sent ainsi ? Je voulu ne plus y penser, passer à autre chose, m'occuper pour aller bien. C’est pour cela que je décidai d'aller me promener un peu dans les environs de l'université. Découvrir de nouveaux visages m'avait toujours fasciné, c'était comme partir sur un renouveau, comme revivre. Rencontrer des gens. Leur sourire, rire avec eux comme si nos vies en dépendaient. Bien sûr, chaque personne sont différente, certaines n’apprécient pas la présence d’un inconnue. Je dois avouer que, si j'étais eux, je trouverais cela assez étrange de rigoler avec une personne quelconque.

Un pied devant l'autre, j'avançais vers le néant. Je ne savais ni où j'allais atterrir, ni qui j’allais rencontrer, ni ce que j'allais faire. Je vivais le moment une seconde à la fois. Sous le soleil qui brillait sir Palm Springs, les perles et diamants de mes tong argent reluisaient et illuminait. Ma peau, déjà foncée de nature, brillait comme du satin au soleil. Vêtue d'une robe de bain blanche, je déambulais tel un mannequin sur le chemin peu emprunté avant de lever les yeux. L'enseigne qui trônait ici m'attira. J'entrai sans plus attendre dans le petit restaurant universitaire devant lequel je me trouvais. Un fois à l'intérieur, passant un main dans mes longs cheveux, j'analysai la salle du regard. Puis, d'un pas déterminé, je contournai les gens afin de me rendre au comptoir où l'ont prenait nos commandes. J'attendais depuis un moment déjà lorsque je le vis. Lui. Cet inconnu qui hantais mes pensés depuis un peu trop longtemps.

Vous est-il déjà arrivé de voir une personne, sans cesse, sans jamais savoir de qui il s'agit ? C'est ce qui m’arrivait. Cet homme, je l'avais vue plusieurs fois, mais je ne lui avais jamais adressé la parole. Je n'étais pas le genre de personne intimidée, pourtant devant lui c'était différent. Il me pétrifiait, il dégageait un truc spécial. Une certaine chose que j'avais envie de découvrir. Je m'étais souvent demandée si j'allais le revoir - chose dite, chose faite - je le voyais au plus grand lapse de temps; au deux jours. Mes yeux étaient rivés sur lui, qui avait déjà son plateau et qui se dirigeait vers une table libre. Soudainement, je me laissai allé - pas comme si c'était surprenant, à vrai dire. Je quittai la file d'attente, prenant soin de m'excuser à chaque personne afin de passer à travers cette dense foule, puis arrivai devant sa table. Pétrifiée, je ne savais plus quoi faire. Il me regardait, attendant surement un signe de vie de ma part. Il était trop tard, je ne pouvais plus reculer, c'était le moment où jamais. Si je partais, il allait sans doute me prendre pour une folle et si je voudrais lui reparler il m'ignorerait. Doucement, je pointai la place libre devant lui.


s u m m e r je peux m'asseoir ? Enfin.. si c'est libre. Parce que tu vois je comprendrais que tu attendes déjà quelqu'un... ou que tu sois le genre solitaire.. ou que...
Je repris mon calme, inspirant profondément.
s u m m e r Pardon... j=quand je suis nerveuse j’ai tendance à trop parler. On peu reprendre du début ?
Je reculai de quelques pas, pour enfin revenir à la table.
s u m m e r Bonjour, je suis Summer. Cette place est libre ?


Puis je le regardai, toute sourire, attendant sa réponse.

La matinée avait été longue. Il était là, assis sur cette chaise en bois qui grinçait à chaque fois qu’il remuait un peu, adossé contre le mur. Et il regardait par la fenêtre, le soleil briller au dehors, les étudiants assis dans l’herbe avec un livre ou simplement en train de terminer leur nuit allongés sur la pelouse. Il aurait aimé pouvoir s’évader, être de l’autre côté lui aussi, se sentir libre, se sentir tranquille, ne rien faire, ne pas avoir à supporter le bavardage incessant d’un instituteur aussi peu passionné par ses propres propos qu’un mathématicien étudiant du Becket. De temps à autres, il griffonnait quelques notes, un mot par-ci, un dessin par là, une envolée lyrique dans un coin de feuille et une gamme en ré mineur en bas de la page. Son cours ressemblait plus à un brouillon qu’à une leçon sur le cortex cérébrale, mais quelle importance, il trouverait sur ce qu’il fallait savoir dans les livres.

Midi sonnèrent enfin. Le son de la liberté, une mélodie stridente et pourtant si douce à ses oreilles, une musique monotone qui annonçait la fin de la demi-journée. Enfouissant ses quelques feuilles éparses dans son sac, il fut le premier à quitter la salle et se précipita à la cantine. S’il se dépêchait, il n’aurait pas à faire la queue. Et effectivement, le réfectoire était encore vide quand il y fit son entrée. Il attrapa un plateau à la volée, y déposa toutes sortes de condiments auxquels il ne toucherait sans doute pas, mais il en avait assez d’arriver à la caisse et de se faire répéter, inlassablement, « vous avez encore le droit à trois articles », et lui de répéter, encore et encore, « c’est bon ça ira. ».

Il s’assit sans plus de cérémonie sur une table, ni trop grande ni trop petite, laissant autour de lui cinq places vides pour ses amis imaginaires. Je vous rassure, il ne parlait pas à des fantômes invisibles. C’est simplement qu’il aimait manger tranquillement, seul dans une bulle que personne ne venait perturber. Personne ?

Il sentit des yeux posés sur lui et il releva le menton. Une jeune fille se tenait là, de l’autre côté de la table, le plateau encore en l’air, semblant hésiter à s’installer sur la chaise vacante. Il connaissait cette fille… Enfaite il n’avait aucune idée de qui elle était. Il ne lui avait jamais adressé la parole et n’avait jamais cherché à savoir de qui il s’agissait. Mais il l’avait déjà aperçue, à chaque fois qu’il se sentait observé, c’est sur elle qu’il tombait, coïncidence troublante, et plus d’une fois il s’était demandé si ce n’était pas simplement le produit de son imagination qui lui jouait des tours. Et pourtant elle était encore là. Le hasard, encore une fois ?
Non. Cette fois c’était différent. Parce qu’elle n’avait pas détourné le regard. Elle était là, le regardant droit dans les yeux, et lui parlait, s’adressant à lui sur un peu un peu hésitant, certes, mais bien déterminé. Après tout, c’était peut-être l’unique moyen de savoir ce qu’elle lui voulait.
D’un signe de tête, il l’invita donc à s’asseoir.

Il la regarda pendant qu’elle s’installait. Elle n’avait pas l’air bien méchant. Un peu intimidée, ou nerveuse comme elle disait, voilà tout.
Un fin sourire se dessina sur son visage. Pour un tête à tête avec lui-même, c’était perdu d’avance. Mais après tout, peut-être qu’une agréable compagnie féminine ne serait pas de tout regret.

« Moi c’est Apolon. » se présenta-t-il docilement.